Agnès Ferla
High Tensions'Wall
29. Mai - 17. Juni 2011
(c) ECAL/Agnès Ferla, 2011
Fotos (c) Michel Bonvin, 2011
Weitere Infos auf:
ecal.ch
Une scène du regard.
Notes sur le travail d'Agnès Ferla.
La peinture, aussi, est un objet réévaluable. On l'a introduite dans le jeu des
degrés, dans l'échelonnement des valeurs. On lui donne ainsi une seconde vie,
ou quelques espèces de survie. Les cycles se referment, on relance les querelles.
Une recherche picturale n'oublie rien du jugement moderne, mais elle ne le
répète pas ; elle le complique ; elle le pervertit. Elle postule que les gestes
qu'elle produit tentent un partage neuf de son histoire. Elle avance entre ce
qu'elle écarte ou convoque ; elle invente ainsi son bonheur, sans, charme ultime,
ne rien promettre.
C'est pourquoi Agnès inventa une machine. Une machinerie plutôt, à savoir
l'organisation d'un dispositif mécanique employé pour opérer les changements
de décors dans un théâtre. Ici la toile remplace le décor, les peintures remercient
les acteurs et le texte, l'artiste joue le metteur en scène, les machinistes, le
souffleur, toute l'équipe. Quelques poulies, des cordelettes, la toile est tirée dans
la peinture, soulevée, retournée, les couleurs glissent sur le lin, coulent, se
mélangent. Les gestes sont précis même si la conception et l'exécution se
fondent aussi sur l'intervention du hasard. Je simplifie. Le processus est ensuite
glacé, refroidi d'un jus translucide et métallisé ; l'image est mise sous film,
laissant irradier ses couleurs à travers son spectre filtré. Car ces oeuvres n'ont de
cesse d'agiter le spectre vivace de la peinture, passée et possible, de conjoindre
une éthique (la définition de quelques limites ou principes), une ironie (ne pas
toucher la peinture, éviter que la limite devienne normative), et une élégance (la
production d'un goût distingué mais distancié, ruiné). Pour nous, Agnès fabrique
des Fantômes.
Pierre Vadi